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Podcast CAP Regen : “Fabriquer un meuble qui dure 100 ans !” Avec Arnaud Vanpoperinghe, PDG de Tikamoon

Dans cet épisode, Eric Duverger reçoit Arnaud Vanpoperinghe, PDG de Tikamoon, Alumni du 1er parcours de la CEC. Ensemble ils abordent les difficultés et les joies du cap régénératif, la transformation profonde de la gouvernance et du leadership, le meuble qui dure 100 ans, l’inspiration tirée des jeunes générations…
CAP Regen 01 Arnaud Vanpoperinghe

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[Éric] Bienvenue dans CAP Regen. Je suis Éric Duverger, le fondateur de la CEC, une association qui existe pour rendre irrésistible la bascule vers l’économie régénérative. Tout le monde en parle de cette nouvelle économie, qui régénère au lieu d’extraire, mais le défi est immense. Avec CAP Regen, nous donnons la parole à des dirigeants engagés au cœur de l’action.

Bonjour Arnaud !

[Arnaud] Bonjour Eric !

[Éric] Alors, Arnaud, je te propose de faire un pacte pour commencer. Ce pacte, il tient en trois mots. Courage, parce qu’il en faut du courage quand on est dirigeant d’entreprise et qu’on s’embarque dans l’aventure de la régénération. Authenticité, l’authenticité de notre échange, on va se dire des choses. Et pragmatisme, parce qu’en fait, on veut rendre très concret cette nouvelle économie, cette nouvelle manière de faire du business, donc on veut être le plus pragmatique possible, donner des exemples hyper concrets. Les trois initiales, courage, authenticité, pragmatisme, ça fait CAP. Alors Arnaud, CAP ou pas CAP ?

[Arnaud] CAP, Éric !

[Éric] Alors Arnaud, merci d’être là. Tu es le président et associé de Tikamoon. Tu as été un des participants de la première CEC des 150 premiers. Cette CEC qui s’est conclue en juillet 2022. C’est d’ailleurs à cette occasion que nous nous sommes rencontrés. Tu es également éclaireur de la Communauté du Coq Vert de la BPI et membre du Club Entreprendre pour la Planète du WWF. Merci d’être ici. Je vais démarrer par une première question qui est : finalement, dans ton enfance, quel métier tu voulais faire et est-ce que déjà tu te disais que tu allais t’orienter vers cette mission d’entrepreneur ?

[Arnaud] Pas du tout. Pas du tout. Dans mon enfance, après le traditionnel pompier et motard, j’avais envie d’être informaticien. Et puis, j’ai eu envie d’être philosophe, parce que j’ai toujours été aspiré par les raisonnements globaux. Finalement, j’ai fait une école de commerce, parce que c’était les années 90. Et donc, c’était le moment de la performance, pour ne pas être déclassé. Donc c’était ça en fait, le bain dans lequel moi j’ai été éduqué, dans lequel je suis né, et j’ai une trajectoire plutôt grand groupe, mais avec des moments un peu étonnants dans le management où j’étais toujours un peu décalé. Et je me suis trouvé très bien quand j’ai été nommé DG d’une des startups du groupe 3 Suisses à Paris. Et là, le fait de pouvoir être qui je suis, manager comme je suis, et avoir cette vision globale et donner du sens, ça m’a donné envie d’être DG. Et en plus, pouvoir le faire avec la liberté de l’actionnaire, donc ça m’a donné envie d’être entrepreneur. Mais c’est arrivé sur le tard.

[Éric] Est-ce que tu peux nous dire, avec quelques chiffres, quelques dates, finalement, quel est le métier de Tikamoon ? À quoi elle ressemble cette entreprise ?

[Arnaud] C’est une belle et joyeuse entreprise du nord de la France. Nous sommes nés il y a 15 ans, en 2010. Nous sommes 250 personnes aujourd’hui. On fait un peu plus de 100 millions de chiffres d’affaires. Voilà, comme ça les chiffres sont posés. Ça a été une aventure immense, énorme, humaine, passionnante. actionnariale qui a été bousculée, basculée en de nombreux termes et à de nombreuses périodes. Notre métier, et ça depuis le début, c’est de dessiner, de faire fabriquer et de distribuer du meuble en bois massif, durable et livré monté. Et donc notre métier, c’est de travailler intelligemment des planches de bois avec des tenons mortaises, avec des queues d’aronde pour produire du meuble qui dure très longtemps. On est distribué principalement par Internet dans toute l’Europe. On fait plus de la moitié du chiffre d’affaires à l’étranger. Et on a ouvert quelques boutiques tout récemment pour poser la marque et poser aussi notre mission du meuble en bois massif monté.

[Éric] Est-ce qu’il y a eu un moment particulier où, en tant que dirigeant, tu as eu peut-être un déclic ou une première intention d’aller dans le green ?

[Arnaud] Il y a eu un premier déclic en 2018, honnêtement. Entre 2010 et 2018, on était dans la survie en fait. Une entreprise a de grandes chances de mourir dans les sept premières années. Donc on était dans, en même temps, survivre et en même temps encaisser la croissance. J’ai une sensibilité personnelle qui est très verte, mais j’ai eu une période professionnelle qui a été très rouge en fait. Et en 2018, il y a des choses qui ont commencé à sonner. Déjà, j’étais très fier de travailler avec du bois massif, puisque finalement, c’est du bois massif, trésor de carbone capté, qui dure longtemps. C’est une chance, quand on est un dirigeant à vocation Hommes et Planète, de travailler avec cette matière-là, matière que Homo a toujours manipulée. C’est une matière préhistorique, le bois. Et donc, ça m’a suffi, en fait, pendant huit ans, de me dire… ouais, je suis très content de travailler avec cette matière. qui est saine, en fait, qui est purement naturelle. Et puis en 2018, j’ai eu le multichoc, tout le comité de direction d’ailleurs, avec les rapports sur l’extinction du vivant. On a eu les mammifères, on a eu les oiseaux, ça m’a beaucoup choqué. Et puis toute cette série de secousses par la jeunesse, les manifestations du lycée, et puis Greta Thunberg, et puis Extinction Rebellion, qui a fait des mouvements qui m’ont moi vraiment interpellé. Et ça, ça a semé des petites graines. Donc, c’est la jeunesse qui a d’abord semé les petites graines, qui nous ont amenés à monter le plan Tikagreen. On s’est dit, OK, on a eu un choc qui était : les concurrents commencent à jouer d’assertion, plus ou moins mensongères, sous la forme d’un tsunami de greenwashing. Nous, ça ne nous allait pas du tout, puisque ces assertions, soit elles étaient non prouvées, soit c’était les trompettes autour de vertus qui ne concernaient que 1% de la collection. Et donc tout ce greenwashing nous a amenés à nous dire : il faut maintenant, nous qui sommes plutôt discrets – on préfère plutôt un syndrome de l’imposteur en le domaine – et bien finalement, on a décidé de ne plus se laisser marcher sur les pieds, de faire notre green coming-out. Et ce green coming-out, c’était sous l’égide des preuves, plus que des beaux discours, et bien allaient, pouvaient démontrer qu’on était vertueux le plus possible avec un bilan carbone avec Carbone 4, l’analyse de cycle de vie avec l’ADEME et FCBA, avec la labellisation FSC, le partenariat avec WWF. Bref, nous avons voulu affirmer que chez nous, c’était no bullshit.

[Éric] Alors, quand on t’écoute, Arnaud, on se dit, voilà, 2018, après une certaine maturité, finalement, l’entreprise arrive dans son adolescence, on va dire, et se lance dans Tikagreen. Et finalement, on va cocher les cases d’être un peu les premiers de la classe dans ton secteur et avec une tentative d’alignement, donc RSE. Alors finalement, en 2020, tu as quand même décidé de t’engager dans la CEC, la Convention des Entreprises pour le Climat. Et là, qu’est-ce qui s’est passé ? Est-ce qu’il y a eu un choc de conscience ? Est-ce qu’il y a eu une remise en question ? Finalement, comment tu décrirais cette expérience et peut-être l’avant et l’après par rapport à 2020 et la CEC ?

[Arnaud] Moi, j’étais ravi de participer à la CEC parce que j’avais envie d’échanger, d’être challengé, au moment où nous, on se pensait un peu… pas des cadors, mais au moins des champions de RSE, en fait, parce qu’on avait fait des choses que très, très peu de PME ont faites. Et puis, ça a été la CEC, un énorme choc en réalité, où on est rentré en tant que champion de la RSE et on est sorti en tant que nain du régénératif. Et c’est cette fameuse séance, je me souviens très, très bien, à Lille, fin 2021, à l’automne 2021, où après une introduction de Christophe Sempels sur le régénératif, on s’embarque dans la question génératrice : mais qu’est-ce qu’on va faire de notre entreprise et qu’est-ce qui doit nous mouvoir pour demain ? Et en fait, on s’est rendu compte avec Benjamin, notre Planet Champion, qu’on avait fait deux omissions. On était myope, dans une certaine mesure. À force d’être concentré sur la qualité du bois, de la construction, ébéniste passionné que nous sommes et la certification FSC, on avait oublié que ce meuble, même s’il durait 100 ans, il fallait qu’on le dise et qu’on accompagne sur 100 ans, donc la dimension temps. Et le deuxième souci qu’on avait, la deuxième myopie, c’était qu’on avait oublié l’écosystème vivant sur lequel tout notre business reposait, c’est-à-dire la forêt. Et donc, ces deux grandes omissions ont été comme un choc pour nous et on a redessiné totalement notre imaginaire et notre rêve, nos intentions. Alors, moi, je dirais personnellement que c’est le déclic sur la durée du modèle d’affaires.

[Éric] Ce n’est pas commun quand même de se donner 100 ans comme durée de modèle d’affaires. Et puis la reconnexion au vivant, en l’occurrence là aux arbres et au cycle de croissance des arbres, c’est deux points singuliers, deux points forts chez Tikamoon. De ce que j’ai pu observer, il y a aussi des aspects sur l’organisation de l’entreprise, la gouvernance d’entreprise. Cet angle-là, est-ce que c’est un angle qui était nouveau aussi, qui est apparu ? Et finalement, est-ce que dans cet aspect gouvernance-organisation, tu vois des leviers complémentaires des deux premiers que tu as mentionnés ?

[Arnaud] Quand on sort du mode survie, on sort de la période rouge en fait, comme on peut lire dans Frédéric Laloux. C’est-à-dire qu’on est dans le mode barbare, on est dans un mode assez rouge. Et il est vrai qu’on est dans un mode participatif, mais pas jusqu’à la gouvernance. Et ça, ça nous a beaucoup, beaucoup questionnés. On est en train d’engager la démarche B-Corp, ça nous questionne aussi. Et donc, ça nous a vraiment fait bouger sur nos instances internes. C’est ce que ça va engager avec B-Corp. Et on a aussi mis en place un certain nombre de démarches qui nous permettent d’intégrer beaucoup plus les salariés dans l’intérêt pour l’entreprise, financier notamment, mais dans les décisions aussi.

[Éric] Et au niveau de la partie prenante actionnariat ? Est-ce que tu es OK de nous en dire un petit peu plus ? Parce qu’on sait que pour beaucoup d’entreprises, la trajectoire, la radicalité de la trajectoire est souvent rendue impossible par les demandes des actionnaires et de maximiser les profits à court terme. On sait qu’il y a vraiment une friction entre les intérêts des actionnaires et parfois les intérêts à long terme de l’entreprise. Toi, tu es quelque part un peu des deux côtés. Comment tu vois cette partie prenante actionnariat par rapport au reste de l’entreprise ?

[Arnaud] Aujourd’hui, on a la chance d’être majoritaire avec mon associé Thibault. Nous avons racheté les parts de Leroy Merlin ADEO il y a trois ans pour justement avoir la liberté de vivre notre chemin et de faire nos choix. Mais ça n’a pas été sans une association avec un partenaire financier, un fonds d’investissement. On est en débat permanent. Pour pouvoir monter ce deal de rachat des parts de l’entreprise, on a dû s’engager dans un certain nombre d’indicateurs de performance économique. Et en réalité, je trouve aujourd’hui qu’on est libre tant que les indicateurs économiques sont respectés. Mais j’ai bien conscience que dans certains actionnariats, ce n’est pas possible. Aujourd’hui, nous avons cette chance-là, ce n’est pas le cas de tout le monde. Ça nous met quand même dans beaucoup de débats. Et d’ailleurs, même dans le comité de direction aujourd’hui, le comité de direction qui est entre l’ancien monde et le nouveau monde, entre performance et robustesse. Et donc aujourd’hui, on a toujours, puisqu’on a été programmé dans les années 90 ou 2000, 2010 pour les plus jeunes. Mais on est toujours quand même dans cette idée de performance, de rentabilité et de croissance. Et il faut sans cesse remettre la perspective sur la table pour réussir à combiner les deux. Quand on a une tentation de rentabilité ou une tentation d’accroissement de nombre de références ou d’accroissement d’une nouvelle catégorie produit, versus, et bien plus de robustesse, plus de rentabilité avec moins de quantité de produits.

[Éric] Est-ce qu’il y a d’autres dilemmes, d’autres épreuves et obstacles que tu rencontres aujourd’hui ou que tu as rencontrés, qui t’ont marqué, qui rendent cette trajectoire compliquée au quotidien ? Est-ce que tu as des exemples, finalement ce qui te réveille sur ce sujet-là, ce qui t’empêche de dormir ? Qu’est-ce qui te vient ?

[Arnaud] On a ce débat sans cesse sur la croissance. Et en fait, on a organisé les Tikagreen Teas avec nos jeunes équipes, qui sont des moments d’échange tout à fait libres. La question revient, pourquoi la croissance en fait ? Et aujourd’hui, on est sur cette logique culturelle déjà de pourquoi la croissance. Il y a aussi une autre difficulté qui est que c’est tellement tentant quand on ne fait pas le chiffre d’affaires prévu, quand on ne fait pas la rentabilité prévue. d’aller secouer un peu les idées et d’aller investir des territoires qui ne sont pas les nôtres légitimement. Est-ce qu’il faut aller dans le canapé ou pas ? Est-ce qu’il faut faire de la déco ou pas ? En quoi est-ce que c’est longue durée la déco ? D’où doit-on sourcer nos meubles ? Ça, c’est un vrai dilemme, parce qu’aujourd’hui nous nous sommes des agnostiques de la provenance. C’est-à-dire que nous pensons que ce qui est important, c’est le meuble en bois massif qui dure 100 ans. Et que quelque part, qu’ils viennent, si c’est prouvé que c’était sain socialement et écologiquement, qu’ils viennent d’Indonésie, d’Inde, du Vietnam, d’Europe de l’Est ou de France, pourvu qu’ils durent 100 ans, et ça devient presque anecdotique sur la longue durée. Sauf que ce sont des prix du simple au double ou au quadruple. Et donc aujourd’hui, notre postulat, c’est de dire, nous choisissons le mobilier durable qui dure longtemps, c’est notre parti pris. Nous vous laissons la liberté de vos engagements et de vos choix de consom’acteurs en fait, selon votre budget.

[Éric] Ça me permet de rebondir sur la dimension de l’embarquement des équipes. Toi, tu as eu quelqu’un qui t’a accompagné dans la CEC, c’est un parcours qui avait duré pendant un an. Tu as eu des prises de conscience, des déclics, certaines formations aussi. Et aussi un questionnement sur la stratégie de long terme et la feuille de route à visée régénérative de Tikamoon. Mais finalement, le plus dur commence. Quand un dirigeant voit une direction, ce qui est le plus dur, c’est d’embarquer et de faire que ça devienne le projet de toute l’entreprise. Est-ce que tu peux nous donner un peu tes clés de lecture sur cette partie d’embarquement de ton écosystème ?

[Arnaud] Ça a été le plus difficile, d’autant plus qu’on était dans un moment de run extrêmement chargé dans l’entreprise, de croissance très forte. Et il a été très difficile pour nous, un, d’embarquer le premier cercle qui est le comité de direction, deux, le deuxième cercle qui est les managers, et puis trois, le cercle de tous les collaborateurs. Ça a été un vrai défi. Je trouve qu’on ne l’a pas très bien fait dans le sens où on n’a pas suffisamment planifié de temps avec les équipes, avec les collaborateurs, au sortir de chaque session CEC pour débriefer, pour embarquer. C’est comme si on avait été un peu intronisé à un élixir et que finalement, c’était très difficile à raconter en fait. Notamment le choc de la session 1 et l’aspiration, l’élan de la session 2. Ce qui nous a aidés, ça a été les projections. En fait, quand on projette “Animal” ou quand on projette “Breaking Boundaries”, là, les débats qui ont suivi nous ont vraiment permis d’embarquer. Et puis après, on a embarqué avec des récits, on a embarqué avec des petites visios, des petites vidéos, on a embarqué avec des échanges. Je ne suis pas sûr qu’on s’y soit pris au mieux. Et je pense qu’on aurait dû bien mieux planifier ces séances-là. Avec le temps, ça a fonctionné, mais il a fallu d’abord une ingestion à mon niveau pour redéfinir ma pensée, puis d’embarquer le comité de direction, puis d’embarquer les équipes. Et maintenant, je raconte et nous racontons un imaginaire qui maintenant embarque, maintenant qu’il a été métabolisé dans notre business model avec la mue que la CEC a provoquée, qui est phénoménale.

[Éric] Ce que je te propose, c’est qu’on parle un petit peu de toi en tant que leader, parce que ce qu’on peut observer dans la CEC, c’est que les entreprises qui bougent le plus vite sont les entreprises qui ont des feuilles de route puissantes et qui créent une aspiration pour effectivement toutes les équipes. Et aussi qui sont incarnées pleinement par des leaders avec leur force de conviction et aussi leur style de leadership. On sent ce besoin de congruence entre un mode de leadership et cette visée régénérative au service du vivant, de la régénération de l’entreprise. Donc finalement, la question que je voulais te poser, c’est : est-ce que tu t’es réinventé pour finalement accompagner cette nouvelle vision ? Est-ce que ça a été plutôt une évolution ? Et où est-ce que tu en es toi-même sur ton style de leadership ?

[Arnaud] En fait, depuis que je suis entrepreneur, je peux être aussi naturel que je le souhaite. Je peux être exigeant et bienveillant et être sans fard. Et j’adore être sans fard dans la vulnérabilité, dans le questionnement, dans les doutes, dans les faiblesses aussi, et parfois les peurs. Et que chacun ose l’exprimer dans l’entreprise, ça, je trouve que c’est une énorme force. Cette faiblesse est une force, enfin, l’acceptation de la faiblesse. La CEC m’a énormément fait bouger, mais je dirais plus cérébralement en fait. On m’a mis la tête à l’envers, Éric. On m’a mis la tête à l’envers. C’est-à-dire qu’on s’est rendu compte, avec le travail dans notre question génératrice, c’était comment peut-on éviter de produire du meuble pendant 100 ans ? Et donc la question était de produire du meuble qui éviterait d’en reproduire un dans 10 ans, dans 20 ans, dans 30 ans, et ainsi de suite, jusque 10. Avec cette idée qui est de dire, mais finalement, ce qui est important, oui, c’est de construire du meuble pour 100 ans, mais c’est de comment faire en sorte qu’on l’accompagne pour aider à entretenir. à réparer, à customiser, à détourner, à revendre, à donner. Et la clé de tout ça, c’est tel que ce qu’on a fait à Lille dans notre boutique circulaire et atelier circulaire, nous reprenons les meubles, on les révise, on les restaure, on les régénère quelque part et on les remet dans le circuit. Eh bien, l’avenir de l’entreprise, quand dans 10 ans ou 20 ans la matière va se raréfier, voire être interdite, moratoire du prélèvement dans le vivant, où ce sera hors de prix, et bien notre métier, ce sera peut-être de réparer et reconstruire, le recrafting, et ceci multi localement pour éviter de bouger le meuble. Et donc moi, j’ai dû vivre une mue culturelle énorme, puisque j’ai un passé de vente de produits. puisque j’ai un cerveau global et j’ai une expérience digitale. Et là, tout change ! C’est-à-dire que l’avenir de l’entreprise, il n’est pas dans le produit, il est dans le service. Il n’est pas dans le global, il est dans le multi local, avec des hubs bien physiques de circularité. Et il n’est pas dans le digital, il est dans le manuel. Et donc, toute cette mue s’est faite, mon leadership n’a pas trop changé, il est ce qu’il est, mon cerveau a beaucoup changé.

[Éric] J’ai envie de creuser un petit peu sur un des aspects qui fait partie de la sauce secrète de la CEC : l’approche tête-cœur-corps. Justement, tu parles de ton cerveau, tu parles de tes émotions, de ta connexion au vivant, est-ce que tu as pu ressentir toi, en tant que leader dans certaines situations, la puissance pour débloquer des verrous de l’approche tête-cœur-corps, de se reconnecter, en tant qu’être humain, avec tes équipes ? Est-ce que c’est quelque chose, un levier que toi-même tu utilises ? Est-ce que tu as des exemples de ressentis à ce niveau-là ?

[Arnaud] On a culturellement, dans l’entreprise, depuis notre naissance, la possibilité d’accès aux émotions. Et je crois que depuis la CEC, on a un peu plus systématisé dans nos réunions, notamment dans le comité de direction, le moment d’inclusion, le moment du début. Comment je me sens ? Comment je viens ? Comment j’arrive ? Qu’est-ce qui me traverse ? Et puis aussi le moment de déclusion, de comment j’ai vécu ce moment en fait. Donc sur la question qu’est-ce qui te traverse en ce moment, il y a des tas de gens qui sont très déstabilisés en fait, et petit à petit, le changement culturel se fait et on en vient à dire des choses. Je me sens triste, je me sens déçu, j’ai mal vécu ce moment-là, ou je l’ai très bien vécu, ou j’ai une énergie d’enfer. Et par exemple, sur notre sensibilité au vivant et notre sensibilité aux hommes, dans un de nos comités de nos séminaires de direction en juin, on s’est dit des choses très fortes, sur ce qui est important pour moi en termes de valeurs, sur ce qui est important pour moi en termes de planète, sur en quoi est-ce que travailler dans cette entreprise, c’est très différent de travailler ailleurs, sur comment je me sens triste par rapport aux abeilles. Tout ça, c’est autorisé. Et maintenant, c’est peut-être un petit peu plus systématisé. Ça nous aide beaucoup. Et petit à petit, ça descend les différents niveaux de l’entreprise.

[Éric] Maintenant, je propose un moment de réflexion sur la visée régénérative. On parle d’économie régénérative, on sait que c’est une visée, on va mettre beaucoup de temps collectivement pour se placer dans la régénération. Et donc, ça va être un chemin, ça va être une aventure. Et donc, il faut qu’on regarde de loin. La question, après tout ce qui a déjà été accompli, les remises en question qu’il y a eu, les dilemmes qui ont été franchis et finalement l’embarquement de l’écosystème. Qu’est-ce qu’il reste à faire pour vraiment aller au bout de la visée régénérative pour Tikamoon ?

[Arnaud] Tellement ! Tellement, Éric ! On est au tout début du chemin, en fait. Je pense qu’on a défini dans ce qu’on a appelé Regen40 le cap de 2030 et le cap de 2040. Le cap de 2030, c’est le cap de la vraie circularité, avec des hubs un peu partout en Europe pour pouvoir faire en sorte que nos meubles circulent. Ce qui est important pour nous, ce n’est pas de vendre quatre buffets par client. C’est que notre buffet… fassent dix clients, en fait, tiennent dix clients, et que nous, on puisse l’accompagner, qu’il ne soit pas mis sur le trottoir au bout de dix ans, par ignorance ou par facilité. Donc, on a vraiment le suivi du meuble pendant cent ans. Ça, c’est extrêmement important, de sorte que, finalement, dans quinze ou vingt ans, on aura tout à fait conscience que la matière naturelle, c’est une matière extrêmement précieuse, qui va être plus chère, et que l’idée, ce sera qu’elle circule, en fait. Mais comme une planche de bois est éternelle – on retrouve des sarcophages – donc la planche de bois est éternelle, à nous de faire en sorte de l’accompagner pendant très longtemps. Il y a aussi une révolution dans notre connexion au vivant, dans notre connexion à la nature, ça on ne l’a pas encore tout à fait réalisé, je trouve. Il faut qu’on soit beaucoup plus proche des associations forestières, qu’on aille faire des stages, qu’on aille s’insérer, qu’on aille participer aux travaux forestiers. Je pense aussi qu’on a à faire une révolution, probablement, de gouvernance. Ça, on ne l’a pas encore fait. D’autant plus que si Tikamoon doit finalement faire, pour ses meubles, la révision des 100.000 heures, avoir des points de rencontre et des points de contact pendant 100 ans, dans 100 ans, je ne serai plus très en forme, et donc, il nous faut non seulement assurer un actionnariat stable pour 100 ans, et en même temps, savoir passer le témoin sur cette vision-là. Mais je pense qu’on a une vraie vocation, on a la chance de travailler du produit qui dure longtemps et on a la liberté de monter quelque chose pour faire vivre ce produit pendant 100 ans. En revanche, on est loin du chemin. Aujourd’hui, on a 2-3% de notre chiffre d’affaires qui est du chiffre d’affaires d’occasion et 0% de notre chiffre d’affaires qui est serviciel. Donc le chemin est important, mais aujourd’hui, nos décisions sont irriguées par cet imaginaire-là, le Regen40, quand on sera dans le recrafting de nos produits, mais aussi des produits en bois massif d’autres, quand on sera dans un mode plus open source, quand peut-être on partagera en mode écosystémique ces plateformes de réparation, de recyclage et de revente. Cette vision-là, elle est très partagée, elle est très inspirante. Voilà, on connaît le chemin, on l’a l’imaginaire. Et petit à petit, on fait pivoter le navire.

[Éric] Alors, je vais poser une question très, très difficile. Tu parlais de l’élixir tout à l’heure. On va dire que l’élixir, ici, c’est la pensée régénérative, la vision régénérative. Arriver à avoir un prisme pour regarder les situations, prendre des décisions, embarquer, qui soit un prisme qui emmène vers régénérer au lieu d’extraire. Jean-Marc Jancovici avait produit son premier livre qui s’appelait “Le réchauffement climatique expliqué à ma fille”. Maintenant, le challenge serait “L’économie régénérative expliqué à ma fille”, ou à un enfant. Quels mots tu emploierais pour dire à quoi ressemble cette économie ? Finalement, pour quelqu’un qui ne connaît pas forcément toutes les complexités du monde économique, et on va se poser la question ensuite pour des étudiants en management, mais finalement, dans les termes les plus simples, comment tu qualifierais cette économie-là ?

[Arnaud] C’est un modèle d’entreprise vers lequel on doit tendre et qui vise à faire plus de bien que de tort aux hommes et à la planète. Et donc ça passe par un diagnostic de toute l’entreprise, de ses dépendances. De quoi dépend l’entreprise, que ce soit du côté du vivant, que ce soit du côté du vivant non humain et du vivant humain, pour faire en sorte qu’on puisse faire pivoter l’entreprise vers un modèle où, à la fin de la journée d’exercice de l’entreprise, les hommes et la planète se portent mieux en régénérant le vivant, en se connectant localement et en servant l’économie locale ou les associations locales, en essayant de faire en sorte de restaurer, et en prélevant le moins possible, et en diffusant un modèle, un message positif dans la relation entre les humains, entre eux, et les humains et la nature. C’est un peu confus, mais simplement, ce serait plutôt ça.

[Éric] Maintenant, on va se poser la question : on est face à des étudiants en école de management, tu y étais il y a quelques années, moi aussi. On nous a enseigné une certaine manière de faire du business à l’époque. Moi, je me souviens, par exemple, dans mon école, premier cours de finance, c’était un prof américain, la finalité d’une entreprise : “profit maximization”, maximisation des profits, et c’était la fin de l’histoire. Voilà, on sait ce qu’on nous a appris, il y a une génération je dirais, maintenant, par rapport à des étudiants en management qui vont se lancer dans le monde économique, qui vont faire leur choix d’entreprise aussi, dans lesquelles ils vont se lancer, comment tu leur décrirais, quelque part tu leur vendrais, les entreprises qui sont engagées vers le régénératif par rapport au business classique ? Quels seraient les mots que tu emploierais pour essayer de donner envie à cette nouvelle génération d’aller vers la régénération ?

[Arnaud] Je leur dirais que c’est l’endroit où se fait la recherche sur l’économie de demain. Ce n’est pas l’endroit de l’entreprise classique, où est l’excitation sur des concepts qui datent d’il y a 50 ou 100 ans ? Je trouve que l’entreprise classique est faite pour les personnes classiques. Et donc finalement le régénératif, il est beaucoup plus créatif. C’est l’invention de demain. C’est facile en fait le monodimensionnel de maximisation du profit, quels que soient les impacts sur les hommes et la planète. C’est extrêmement facile, mais c’est sauvage ! Qu’est-ce que c’est plus subtil, qu’est-ce que c’est plus intelligent, qu’est-ce que c’est plus complexe, dans le bon sens du terme, que d’essayer justement d’imbriquer le profit dans l’humain et dans la planète, la soutenabilité forte par rapport à faible. Et je trouve qu’il faut être beaucoup plus créatif pour inventer des business models qui soient soutenables. Ça nous a demandé, chez Tikamoon, moi ça m’a demandé un an, deux ans de réflexion, d’essayer de trouver la solution du “mind maze” en quelque sorte. Et jusque peu, j’avais encore la résistance de la croissance, par exemple, où ce n’est pas naturel en fait, la non-croissance. Du côté de l’entreprise régénérative, on invente quelque chose de nouveau pour tout le 21ème siècle, et avec des concepts qui sont passionnants, de la robustesse ou la performance. Comment restaurer le vivant ? Comment est-ce qu’on fait en sorte d’intégrer tout l’écosystème ? Comment est-ce qu’on fait en sorte de penser au-delà du climat ? C’est l’endroit des génies créatifs de l’économie de demain, l’entreprise régénérative.

[Éric] Merci ! En tout cas, moi, tu m’as embarqué. Et alors, on va encore monter dans le niveau de complexité, puisque là, je pense que l’enfant à qui tu as expliqué a compris. L’étudiant en école de management est embarqué. Et finalement, on aime tous les challenges, comme tu le dis, et de s’embarquer dans cette économie du 21ème siècle qui est fortement soutenable. C’est sans doute aspirationnel pour les nouvelles générations. En tout cas, c’est notre challenge. On ne veut pas rester quelques férus de pensée régénérative qui resteraient isolées et minoritaires. Donc, il y a vraiment cet enjeu-là. Peut-être le niveau de difficulté supplémentaire, c’est par rapport à des forces politiques. Une pensée qui est encore majoritaire aujourd’hui, installée dans le monde économique, je dirais de syndicats patronaux, de clubs d’entrepreneurs, qui sont encore dans un schéma de soutenabilité faible. Donc, penser à la durabilité de mon entreprise, mais pas au-delà, dans un schéma aussi de compétition, compétition économique, guerre économique. Et de croissance verte, où en fait, on voudrait continuer avec l’ancien paradigme en mettant des technologies ou des nouvelles solutions, mais finalement sans faire un renversement de paradigme. Donc, par rapport à cette pensée-là, qui est dominante aujourd’hui, et dans les hautes sphères aussi de notre gouvernement, quelles seraient justement les explications, les arguments qu’on pourrait trouver pour essayer d’embarquer plus largement et de convaincre aussi plus largement ?

[Arnaud] C’est tellement facile, en fait, de fermer les yeux. C’est tellement facile de se dire mais finalement tout va bien. Je pense que les milieux économiques d’hier, ils feraient bien d’aller discuter avec Arthur Keller et d’aller voir un peu tous les scénarios qui sont : si on ne prépare pas la chute, on va la subir. Et en même temps, la question de la concurrence et de la compétitivité est centrale. C’est-à-dire qu’aujourd’hui, que ce soit entre entreprises, entre pays ou entre continents, il est tellement difficile d’être dans l’autolimitation. Aujourd’hui, c’est tellement difficile et on ne peut pas évincer cette question. Si je suis à la tête d’une équipe de foot et que parce que je n’ai pas envie d’abîmer le dernier gazon qui existe sur le terrain de la Coupe du Monde, je vais jouer au foot en pantoufles, je vais probablement me faire éliminer en fait. Et donc, à quoi ça sert ? Tandis que si la FIFA décide que le foot, ça se joue en pantoufles, et bien génial ! Voilà, Sapiens, il va créer des pantoufles spécialisées, des ballons spécialisés pour foot sur pantoufles, et toute sa créativité dans de nouvelles règles va s’inventer en fait. Il faut qu’on change de règles, et c’est toute la difficulté de ma réflexion aujourd’hui, c’est comment peut-on réguler les marchés pour qu’on soit dans les mêmes règles et qu’il n’y ait pas de tricheurs ou d’imposteurs qui renversent les bienfaiteurs et les volontaires, en fait. Ça, c’est vraiment très difficile.

[Éric] Alors ça tombe bien, puisque tu m’embarques, on approche de la fin de cette conversation. Si tu avais un super pouvoir ou une baguette magique pour transformer des règles du jeu, ou pour transformer le contexte dans lequel se fait le business, qu’est-ce que tu irais toucher aujourd’hui ? Qu’est-ce que tu irais changer, justement, pour que, finalement, les plus vertueux puissent être les gagnants et emmener les autres ?

[Arnaud] Il pourrait y avoir des primes aux vertueux, des vrais labels aux vertueux, la police de la communication verte… soit, mais ce serait très local. Moi, j’avais été marqué par une des planches de Jancovici dans “Le Monde sans fin”, où on voit une très belle Mère Nature, et on se rend compte en fait que toute l’économie est basée sur l’extraction de ce que Mère Nature offre gratuitement. Et que le problème, c’est que l’extraction, la valeur de ce qu’on extrait, que ce soit le pétrole, le bois ou toute autre chose, c’est tout simplement le coût pour aller chercher la matière première. Et c’est tout le drame. Ce n’est pas assez cher. On a trop de pétrole. C’est peut-être la grande tentation d’avoir autant de pétrole sur la planète. Mais finalement, c’est une drogue, jusqu’où ira Sapiens dans son autodestruction ? Je pense que si on intégrait, vraiment en amont, dans le coût des matières premières, non pas le coût de l’extraction, mais le coût du dommage à long terme, on n’aurait pas un baril à 100 dollars, on aurait un baril à 1.000 dollars. Et peut-être du bois 5 fois plus cher. Et ainsi soit-il. Je pense que ça changerait tout. Que ça viendrait mettre l’énergie au bon endroit. Local, durable, renouvelable. Et si j’avais une baguette magique, j’aimerais pouvoir dire au monde entier, préparez-vous, le pétrole sera 10 fois plus cher dans 5 ou 10 ans. Préparez-vous !

[Éric] Juste une toute petite digression sur la dimension sociale des bouleversements à venir. Imaginons les matières premières qui font x10. On a une vraie question. Je pense que c’est une question aussi que tu te poses de l’accessibilité de certains produits, certains services pour le plus grand nombre. Ce qui a permis tout de même une économie, une massification. Et donc, avec la raréfaction des ressources, la hausse des prix des matières premières, Comment tu vois la réconciliation entre l’écologique et le social ? Ce challenge-là, tu l’as en tête sans doute. Quelles sont les clés que tu as pu trouver jusqu’à présent ?

[Arnaud] Il doit y avoir un accompagnement politique de la transition écologique au niveau social, évidemment, de compensation. Et je pense qu’on a vraiment de quoi aller puiser dans certaines poches pour réaccorder ailleurs, pour faciliter cette transition, que ce soit en agriculture, que ce soit sur l’industrie, que ce soit le retour du local, le retour de la réparation. Il y a de très, très belles choses qui sont écrites en ce moment sur la réparation, réparer, entretenir, prolonger la durée de vie, sur la production un peu plus localisée, la transformation un peu plus localisée. Je n’ai pas de baguette magique, mais ce qu’on peut lire dans certains romans d’inspiration sur des nouveaux liens, des nouvelles solidarités, une nouvelle localisation et une nouvelle autonomie locale d’alimentation, d’habiter et de se meubler, de s’équiper. Je pense qu’il y a des choses dans les “repair cafes” et autres, il y a des idées à aller chercher et ça ne passera pas non plus sans une désintoxication de la fast fashion, de la consommation, de se départir du non nécessaire et de revenir à des communautés et des relations locales et toutes simples qu’on a un peu perdues. Il y a un gros travail de désintox quand même, je crois.

[Éric] On arrive à la dernière question, Arnaud. Déjà, sur tout ce que tu as présenté sur Tikamoon, ce que je voulais signaler, c’est qu’il y a beaucoup d’informations qui sont disponibles, notamment sur notre site, et puis, aller vivre l’expérience Tikamoon dans les magasins. Il y a aussi un cas BPI qui a été travaillé très en détail pour décrire la transformation de l’entreprise. Donc, les personnes qui voudront creuser pourront le faire. Et merci d’avoir rendu ça accessible. La dernière question : ton mot de la fin. Justement, on va revenir sur la question de l’enfance que je t’avais posée au début. Qu’est-ce que tu aurais envie de dire aujourd’hui pour les générations futures par rapport à l’inquiétude qui peut être vécue par les nouvelles générations qui arrivent, les enfants qui arrivent ? Finalement, ce serait quoi tes messages que tu voudrais faire passer ?

[Arnaud] Moi, j’ai grande foi en cette jeunesse, je suis bluffé, en fait. Je suis bluffé par cette jeunesse qui est de plus en plus végétarienne, par cette jeunesse qui est de plus en plus dans les friperies. Notre jeunesse… mes fils me donnent des leçons chaque jour, en fait. C’est eux qui me prennent par la main aussi vers ce nouveau modèle. Ce sont aussi ces ingénieurs qui revendiquent leur non-coopération à un système économique extractif lors des cérémonies de clôture ou de diplôme. Je suis très admiratif de ça. Je pense qu’ils n’ont plus peur tel qu’on a pu avoir peur. Ils n’ont plus peur. Ils sont beaucoup plus libres que nous. Moi, personnellement, j’ai été dans la performance pour éviter le déclassement. Et on était dans une situation où il fallait absolument éviter le chômage de papa. Dans certains cas, ça mettait la pression. Si on est détaché et libre des apparences, des symboles, et qu’on est OK avec une “slow life” en termes de revenus, de niveau de vie, et de niveau de s’habiller, de se vêtir, de s’équiper, et bien finalement, c’est une vraie liberté. Et j’ai l’impression que cette jeunesse a un pouvoir énorme dans ses actes de consommation. que ça doit bien paniquer certains de les voir se tourner vers les friperies, repriser, réparer, échanger, se prêter, plutôt que d’acheter. Donc j’honore… je suis très admiratif de la liberté de cette jeunesse qui, je pense, n’a pas fini de nous bousculer.

[Éric] Merci beaucoup Arnaud. Alors on avait commencé avec trois mots, si tu te souviens. Donc moi, j’aimerais clore cette conversation déjà en te disant merci. Merci pour le courage, parce que le courage, il en a fallu pour le premier cycle de Tikamoon, les 8 premières années, puis le premier cycle aller vers le green, puis maintenant aller vers le régénératif. Il en faut en tant que dirigeant aussi, et opérer cette transformation et embarquer. On avait parlé d’authenticité, et donc là, merci d’avoir parlé à cœur ouvert, aussi avec ton style, dans le parler vrai. Merci pour ça. Et puis, on voulait faire preuve de pragmatisme en donnant des exemples concrets, des chiffres. C’est ce qu’on a fait. Il y a eu plein de pépites tout au long de cette conversation, à creuser, bien sûr, par les auditeurs qui veulent aller plus loin. Voilà, courage, authenticité et pragmatisme en route pour le CAP Regen. Merci beaucoup !

[Arnaud] Merci Éric !

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