Présidentielle
Les Entreprises pour le Climat interpellent La République En Marche
Ondine Suavet (Mylight System) et David Godest (Dolmen/Treebal) ont rencontré Jean-Charles Colas-Roy, représentant écologie d’Emmanuel Macron (La République En Marche) pour discuter concrètement de son plan pour la transition économique.
Le résumé
Quel déclic environnemental ?
Formé comme ingénieur, Jean-Charles Colas-Roy débute sa carrière professionnelle au sein d’une société spécialisée dans le secteur énergétique. Il est alors chargé de concevoir et de développer des services visant à faire des économies d’énergies en orientant les consommations. Il s’agit de son “premier déclic”. Le second intervient alors qu’il est élu député de la majorité d’une circonscription de montagne : il est témoin des conséquences du changement climatique, fortement prononcés dans son département.
Compter ce qui compte vraiment : comment ?
Emmanuel Macron, dont Jean-Charles Colas-Roy est le référent “Transition écologique” souhaite passer d’un “modèle de croissance” à un “modèle de prospérité plus attentifs aux hommes et à la nature”. Sans souhaiter la décroissance, le candidat, à travers les mots de son conseiller, semble soutenir la sobriété. Pour lui, les seuls indicateurs économiques existant aujourd’hui ne suffiront pas à mesurer et motiver le passage d’un modèle à l’autre. Pour le conseiller, d’autres modèles de modèles sont à inventer ou à suivre lorsqu’ils existent déjà, pour mesurer tout à la fois les enjeux climatiques et les conséquences des activités économiques sur le Climat. Cette transition ne pourra se faire que si l’ensemble des parties prenantes sont impliquées : entreprises, citoyens, membres de la fonction publique, et collectivités locales.
Quelle planification pour la transformation de l’économie française ?
Face aux conséquences du réchauffement climatique et des profondes transformations qu’il peut induire, le rôle du politique selon Jean-Charles Colas-Roy tient à la conciliation de l’urgence climatique et de la nécessité d’accompagner les acteurs économiques dans cette transition. Deux axes de politiques publiques apparaissent comme particulièrement efficaces : la formation et la sensibilisation. Par ailleurs, le référent “Transition Ecologique” considère que la transition, voire la transformation du secteur économique ne pourra se faire que si elle entraîne la création d’emplois. Le candidat et son conseiller jugent ainsi majeur la mise en place d’un “grand plan de formation et de reconversion” afin de favoriser l’orientation vers les nouveaux métiers de la transition dès la formation initiale.
L'analyse
Quelle conscience environnementale avez-vous ressentie dans les propos de Jean-Charles Colas-Roy et le programme d’Emmanuel Macron ?
L’engagement du représentant n’est pas à mettre en doute, et celui-ci a prouvé qu’il était conscient de l’urgence d’agir lors de son mandat. En revanche, si les indicateurs donnés lors de la discussion étaient pertinents pour mesurer l’action politique du candidat, ils le sont moins pour mesurer les conséquences climatiques de ces actions. Par exemple, le représentant évoque le nombre de maisons rénovées, mais pas la quantité d’émission carbone évitée grâce à ces rénovations.
La discussion était articulée autour de trois idées : conscience et formation dans les mondes politique et économique, mesure d'indicateurs autres que le PIB et transition de l'emploi. Les propositions vous ont-elles convaincus ?
Le candidat s’est engagé à soutenir une formation sur les enjeux climatiques pour les décideurs s’il est réélu. Nous avons bien noté cette volonté qui rejoint l’une des propositions clé de la Convention des Entreprises pour le Climat. Si nous percevons que ce sujet est important pour le candidat, nous regrettons toutefois le manque de propositions concrètes sur l’accompagnement et la formation aux métiers de demain. Le représentant est conscient de l’impact de la transition écologique sur l’emploi, mais les mesures à mettre en place pour accompagner au mieux cette transition devront être précisées.
Si Jean-Charles Colas-Roy et Emmanuel Macron étaient amenés à travailler sur un deuxième Projet de Loi Climat, que leur suggéreriez-vous d'y mettre ?
Nous conseillerions au candidat et son représentant la mise en place d’une comptabilité environnementale obligatoire pour toutes les entreprises, soutenue par un mécanisme fiscal incitatif pour encourager la transition des acteurs économiques. Nous soutenons également la mise en place d’accompagnements concrets vers les métiers de demain. Cela passe par le soutien à la reconversion professionnelle, mais également, en amont, par la mise en place d’un indicateur permettant d’indiquer aux étudiants la compatibilité de leur formation avec les enjeux de la transition environnementale. Enfin, nous aimerions que le pouvoir en place puisse imaginer une politique ambitieuse permettant de transformer notre logistique actuelle en une logistique “propre”, en recourant davantage aux transports ferroviaires par exemple.
Le programme d'Emmanuel Macron
Emmanuel Macron a prévu 10 Mds€/an pour financer la transition écologique, soit 50 Mds€ sur l’ensemble du quinquennat. Cette somme est destinée à poursuivre les perspectives de rénovation des bâtiments, les primes à la conversion, le soutien aux réseaux de chaleur, la plantation d’arbres, le soutien à l’installation de nouveaux agriculteurs.
Le candidat prévoit une planification déclinée dans chaque territoire, par les régions, départements, communes, pour des choix locaux sur la production d’énergie (solaire, éolien...) et la décarbonation. Cette planification sera également déclinée dans chaque grand secteur économique, avec une négociation entre tous les acteurs pour déployer les solutions de décarbonation, coordonner les investissements, organiser la transformation des emplois...
Dans son programme, Emmanuel Macron propose un nouveau pacte pour la production, passant notamment par une planification de la transition écologique et la réindustrialisation du pays. A ce titre, il propose d’investir pour développer les filières françaises et l’innovation et d’utiliser la commande publique comme levier pour la réindustrialisation. Il prévoit ainsi de réviser la politique d’achat de l’État : l’objectif prioritaire sera d’acheter local, plutôt que d’acheter « toujours moins cher », pour développer l’innovation et les filières françaises. Pour rappel, il propose également de décliner la planification écologique à chaque secteur d’activité pour déployer les solutions de décarbonation. Enfin, le candidat envisage de réduire les impôts de production qui pèsent sur l’industrie et l’agriculture, notamment en supprimant la CVAE pour toutes les entreprises.
Concernant les entreprises, le candidat prévoit de faire dépendre obligatoirement la rémunération des dirigeants des grandes entreprises du respect des objectifs environnementaux et sociaux de l’entreprise. Il a également affirmé désirer mettre en place une information claire dès l’achat sur l’impact environnemental des produits courants (cosmétique, vêtements...). Emmanuel Macron prévoit de former, avant la fin de la décennie, 1 million de personnes aux métiers d’avenir (intelligence artificielle, énergie, transition écologique...).
Le programme prévoit la construction de six centrales nucléaires nouvelle génération et mentionne par ailleurs des objectifs de développement des énergies renouvelables pour 2050 (multiplication par 10 du parc photovoltaïque, l’implantation de 50 parcs éoliens en mer et création d’une filière française de production d’énergies renouvelables). Il prévoit enfin la planification déclinée dans les territoires pour opérer des choix locaux notamment en matière de production d’énergie.
Emmanuel Macron prévoit de réduire massivement les exportations de déchets, en développant les filières industrielles françaises de recyclage. Le candidat annonce également la plantation de 140 millions d’arbres d’ici la fin de la décennie, soit 2 arbres par Français, et affirme vouloir investir dans la filière française du bois.
Le programme d'Emmanuel Macron sur l’agriculture et l’alimentation est très succinct et tient en quatre phrases. La principale proposition du candidat est d’investir massivement dans l’innovation pour une “troisième révolution agricole” axée sur la robotique, le numérique, et la sélection variétale. Par ailleurs, Emmanuel Macron promet une “loi d’orientation et d’avenir pour assurer le renouvellement des générations, la formation et l’installation des jeunes agriculteurs”, la réduction des impôts auxquels sont soumis les exploitations agricoles”, et un “plan d’autonomie alimentaire dans chaque territoire ultramarin pour soutenir l’économie locale et lutter contre la vie chère”.